L'oracle FA ou IFA originaire d'Afrique de l'Ouest Yoruba a
atteint le Bénin vers le 17ième siècle par l'intermédiaire du Nigéria. La ville
d'Ifè au Nigéria reste pour tous les adeptes de cette voie évolutive le sanctuaire
incontesté du FA. Au Togo, il est appelé Afa et au Nigéria Ifa. Le système de
divination IFA a été ajouté en 2005 par l'UNESCO sur sa liste des
"chefs-d'oeuvre du patrimoine oral et immatériel de l'humanité".
Le FA est à la fois science et divination, présidant au
destin de l'homme. Il est un livre ouvert sur le passé, le présent et l'avenir,
enseignant à l'homme ses liens profonds avec la nature, tout en lui dispensant
grâce aux contes allégoriques liés à chaque arcane, une grande et très profonde
sagesse existentielle. Le FA conduit le postulant des ténèbres à la lumière et
fait de l'initié un homme régénéré, plus sûr de lui car ayant touché aux
arcanes de son être profond. Le FA permet de retrouver la paix profonde et
l'équilibre intérieur.
Le Fa est certes une géomancie, une technique divinatoire,
mais c'est là un aspect mineur des choses. Le FA est avant tout une voie de
connaissance. La société secrète initiatique du FA entre dans la catégorie des
sociétés authentiques et traditionnelles. Par le FA et à travers le FA,
s'ouvrent à l'homme de nouvelles perspectives. Il peut sinon changer son destin
ou du moins le modifier dans le sens du mieux, afin de mieux se connaître et de
mieux s'assumer. L'initiation au FA conduit le candidat à mourir symboliquement
et à renaître en initié.
Une initiation au FA conférée dans La foret
sacrée :
FA-ZU:
Interrogé sur l'âge requis pour être admis au FA-ZU, un devin
Babalawo ou Bokono d'Abomey au Bénin répond en ces termes :
" il faut, pour se rendre dans la forêt
sacrée, n'être ni trop jeune, ni trop vieux. A quoi bon aller au FA-ZU se faire
révéler le secret de la vie si l'on est déjà près de la mort ? Ceux qui ont
atteint ou dépassé la puberté, et peuvent tenir dans leur main les 18 noix de
FA sans les laisser échapper ".
Lorsque le postulant a réuni les objets prescrits: (animaux,
volailles, couteau, houe, tissu, boisson,...etc), il se rend chez le Bokono où
il les dépose. Des prières sont dites pour tous ceux qui doivent participer à
la cérémonie. On donne ensuite au néophyte de l'eau à boire. Le départ pour le
bois sacré a lieu le soir même. Il faut préciser que lorsque la déforestation
oblige le Bokono à organiser la cérémonie dans sa propre maison, le couteau
demandé au candidat permet de stimuler la pénétration dans une forêt dense, où
l'on doit se frayer un chemin au coupe-coupe.
En cours de route, le candidat n'a pour tout vêtement qu'un
pagne usagé, noué autour des reins. Il reçoit d'un assistant du Bokonon un
certain nombre de bourrades. A l'un des bouts de son pagne est nouée une
modique somme d'argent censée représenter toute sa fortune. Le candidat
insiste ainsi sur sa pauvreté au moment où il n'est pas encore éclairé par le
FA. A l'approche de la forêt, on l'interpelle:
-où vas-tu
?
- je vais connaître ma vie, je veux voir mon
signe de FA
" On n'entre pas ici dans la forêt de FA.
Donne de l'argent avant d'entrer " poursuit celui qui l'a interpellé.
Le candidat donne quelques sous et poursuit son
chemin.
Un deuxième assistant du Bokonon l'arrête quelques minutes
plus-tard dans les mêmes conditions que le premier.
En fin de trajet, un troisième assistant lui pose les
questions suivantes:
- as tu fait tout ce que tu devais faire avant de
venir ici ?
- as tu été au marché pour offrir de bonnes
choses à ton Bokono ?
- as tu labouré ton champ ?
- as tu fabriqué ou porté son hamac ?
- lui as tu donné un mouton à cornes ?
- lui as tu offert une mouche à cornes ?
- lui as tu offert un cheval à cornes...etc
Le candidat répond par l'affirmative à toutes les questions
dont les dernières évoquent l'effort surnaturel qu'il doit accomplir pour
transformer sa vie. Les interpellations sur le chemin du bois sacré symbolisent
les difficultés de l'existence et la nécessité d'acquérir et de dépenser des
richesses avant de s'élever socialement.
Le candidat entre dans l'enceinte sacrée, un panier sur la
tête contenant les volailles demandées par le devin. une fois le panier retiré,
on lui bande les yeux. Des sacrifices sont effectués et on allume un feu dont
la fumée, s'élevant vers le ciel, est censée porter les paroles, les
pensées, les voeux de humains vers Mawu (Dieu), car la révélation des choses
cachées relève de lui seul.
Quelques instants plus-tard, le bandeau lui est enlevé. Il
découvre un petit tableau sur lequel figurent les indices des seize signes
majeurs du FA. Le Bokono les énumère dans l'ordre.
Puis il continue en ces termes:
voir ce tableau, c'est voir le FA en pleine lumière. Seuls
les initiés peuvent le contempler et accéder à la connaissance des mystères
qu'il renferme.
il est demandé au candidat d'élever un petit monticule de
terre et de s'y installer. Le bokono dépose dans la concavité du fer houe les
noix de FA (noix de palme), qu'il a apportées et les verse entre les mains du
candidat. La houe est l'instrument qui sert à creuser les tombes et qui ouvre
aux morts le domaine de l'au-delà. L'initiateur par son geste, reconcilie le
candidat avec la houe, c'est à dire avec la mort et l'inconnaissable. Les noix
de FA représentant la vie, la mort, par l'intermédiaire de l'initiateur et par
la grâce de FA, se transforme en vie. La houe, instrument de travail, est
aussi un symbole de richesse.
Au milieu des chants de l'assistance, le candidat sur
l'invitation de l'initiateur porte les noix à son front et à son coeur, les
élève vers son maître et vers les quatre points cardinaux, puis les repose sur
le fer de houe. Ces gestes seront répétés trois fois. Lorsque les noix sont
versées pour la troisième fois dans les mains du candidat, on lui apprend
comment les manipuler pour obtenir, découvrir son signe de FA.
Quand le signe de FA est trouvé, les sacrifices exigés sur
place sont immédiatement effectués et l'assistance quitte la forêt ou FA-ZU.
Le lendemain, l'initié, le corps marqué de tâches blanches,
noires et rouges, se rend en brousse avec son maître, un assistant et le
tableau où les signes majeurs de FA sont inscrits. Un trou est creusé. Le
tableau y est déposé et l'initié s'y installe. L'assistant lui rase la tête,
lui coupe les ongles, lui lave le corps à l'éponge et au savon, puis lance dans
le trou le pagne usagé qu'avait porté l'initié. Le trou est fermé.
Habillé de blanc, l'initié revient à la maison de son maître
où il se passe le haut de la tête à la craie blanche et fixe sur son front une
parure faite avec du fil de couleurs blanches et noires et des plumes de
perroquets.
Trois jours plus-tard a lieu la recherche du signe de FA
complémentaire (Agbassa). Il correspond en astrologie au signe ascendant. Les
cérémonies se terminent par l'interprétation des deux signes trouvés.
L'initiation au FA qui vient d'être décrite n'est que la première étape
d'un long parcours. L'initié pourra accéder par la suite à des degrés plus
élevés s'il en est jugé digne, et s'il dispose de moyens financiers
nécessaires.